Yvon Berland, “Le mérite des plus jeunes aujourd’hui, c’est d’être plus attentif à leurs conditions de travail”
Entretien avec le candidat-médecin à la mairie de Marseille
04/10/2019
Il s’est lancé dans la course à la mairie de Marseille sous le drapeau LREM-Modem après avoir vécu une vie dans la médecine. Yvon Berland, président d’Aix-Université et néphrologue, répond aux questions de Jeunes Médecins.
Médecine et politique, c’est compatible? A 68 ans, Yvon Berland exerce en tant que néphrologue à l’AP-HM, a été directeur de service à l’hôpital Sainte-Marguerite, médecin coordonnateur du centre d’investigation clinique de Marseille, avant de prendre la tête de la fac de médecine de l’université de Marseille, pendant 16 ans. Il est aujourd’hui candidat à la mairie de Marseille sous la bannière LREM. Entretien.Photo: Aix-Marseille Université
Comment votre carrière de médecin a influé dans votre décision de prendre la tête de l’université de Marseille et de vous lancer dans les municipales?
J’ai été sollicité par des partis politiques, notamment En Marche, en mars 2019, pour réfléchir à être candidat à l’investiture de la mairie de Marseille. Après la fin de mon mandat en août, j’ai répondu “oui” en sachant que toutes les actions que j’ai menées en tant que médecin, d’abord, puis chef d’un grand service de néphrologie, et en tant que doyen d’université, m’avaient apportées une compétence non négligeable qui me permettait avec beaucoup de conscience de pouvoir postuler à la mairie de Marseille.
Qu’est-ce qui a motivé ce choix?
J’ai beaucoup donné au service public en tant que professeur au CHU, que chef d’un grand service, que doyen d’université. Je voyais là une possibilité de continuer mon action au service d’une ville, à laquelle je crois avoir beaucoup apporté dans toutes les actions que j’ai menées jusque là.
Aujourd’hui, la médecine fait face à une vague de suicide. Comment y remédier? Que pensez vous des conditions de travail des jeunes médecins?
Aujourd’hui, les conditions sont très hétérogènes selon qu’un médecin travaille en libéral, s’associe dans un groupement ou travaille dans le service publique. Ce sont des métiers où il y a un contexte professionnel qui impacte le côté personnel, familial… c’est un sujet assez complexe. Les conditions de travail doivent-être prises en compte pour les jeunes médecins, et il doit y avoir des organisations qui permettent d’avoir des alertes pour anticiper toute évolution négative de tel ou tel jeune médecin. Ce système doit comprendre tous les échelons d’un hôpital.
Aujourd’hui, il y a une grogne des médecins et du personnel hospitalier concernant les conditions de travail, notamment aux urgences.
Les conditions de travail sont pénibles pour les médecins urgentistes, mais plus généralement aussi pour les médecins hospitaliers. Mais ce ne sont pas que les conditions de travail, il s’agit aussi d’une réflexion beaucoup plus profonde, liée à l’offre de soin. Ce n’est pas un sujet qui doit intéresser que l’hôpital, ça touche aussi la médecine libérale et les établissements privés. Cela doit amener à une réflexion sur comment réorganiser l’offre de soin et prendre en charge le concitoyen avant qu’il n’arrive aux urgences à l'hôpital. C’est un sujet qui m’est cher. Pour aller plus loin, il faut se demander si on a toujours besoin de faire appel à un médecin, et si il n’y a pas la possibilité d’organiser, et ce que j’ai prôné longtemps, de partager les activités avec les professions paramédicales.
La ministre a annoncé la création de postes d’infirmiers de pratique avancée pour les urgences. Qu’avez vous pensé de cette mesure ?
Se demander si toutes les prises en charge qui sont dévolues aux médecins ne peuvent pas être confiées aux infirmiers de pratique avancée, c’est une proposition d’Agnès Buzyn, et j’y souscris totalement. C’est d’ailleurs moi qui ai fait émerger le sujet des IPA dès 2002, lorsque j’étais président de l’observatoire des métiers de santé. S’agissant du niveau de rémunération, il faut regarder ça de près, concernant les médecins comme les IPA.
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Une des annonces de la ministre qui a beaucoup fait polémique portait notamment sur le budget alloué à son plan de refondation des urgences: 750 millions d’euros, débloqués en crédit, c’est à dire qu’ils vont être ponctionnés à d’autres services. Vous en pensez quoi?
Acteur médical, je suis contre. Mais si je raisonne en gestionnaire, je comprends qu’elle n’ait pas trouvé l’argent ailleurs. Il faut cependant faire attention à ne pas déshabiller Pierre pour habiller Paul. Ceci étant, je peux imaginer que lorsque l’on est ministre, on dispose d’un budget et il faut y faire attention..
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Quand vous étiez jeunes médecins, vous avez rencontré des problèmes particuliers dus à votre statut?
Je n’ai pas souvenir de gros sujets qui m’aient beaucoup impactés. On était le nez dans le guidon, très très impliqués dans le quotidien des gardes, surtout dans une spécialité comme la mienne en néphrologie. Et probablement, on ne réfléchissait pas suffisamment à cette époque à nos conditions de travail. Le mérite des plus jeunes aujourd’hui, c’est d’être plus attentif à ça.
Propos recueillis par Rémi Yang
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