Les femmes médecins, toujours victimes d'importantes discriminations
08/03/2024
Pour 1 répondant sur 3, les comportements sexistes sont assez fréquents voire très fréquents
71,6% des répondants rapportent qu’il est assez fréquent (32,8%) voire très fréquent (38,8%) qu’une consœur subisse des blagues, des propos, des comportements sexistes.
Durant leur carrière médicale, 55,2% des répondantes disent avoir été victimes d’une situation de discrimination ou de harcèlement lié au fait d’être une femme, une fois (15,5%) voire plusieurs fois (39,6%), et 66,4% des répondants disent avoir été témoins d’une situation de discrimination ou de harcèlement lié au fait d’être une femme, une fois (8,6%) voire plusieurs fois (57,7%).
Ces chiffres augmentent fortement lorsque l’on demande aux répondants s’ils ont été victimes ou témoins d’une situation de discrimination ou de harcèlement lié au fait d’être une femme durant leurs études : 63,8% des répondantes disent alors avoir été victimes d’une situation de discrimination ou de harcèlement lié au fait d’être une femme, une fois (12,9%) voire plusieurs fois (50,8%), et 81% des répondants disent avoir été témoins d’une situation de discrimination ou de harcèlement lié au fait d’être une femme, une fois (6,9%) voire plusieurs fois (74,1%).
La majorité des discriminations en raison du genre ont lieu dans le travail quotidien
Si les répondants rapportent que ces discriminations ont eu lieu à l’annonce d’une grossesse ou au retour d’un congé maternité ou parental (17,2%), lors d’un recrutement, d’un concours, d’un accès à un stage (10,9%), lors d’un changement de statut du contrat (durée du CDD, passage en CDI, titularisation, etc.)(8,9%), à l’occasion d’une demande d’aménagement du temps de travail (7,9%), les discriminations ont majoritairement lieu dans le travail au quotidien (37,9%).
Qui sont les auteurs ? Les discriminations ont majoritairement été le fait d’un supérieur hiérarchique direct (46,5% des situations), mais également de confrères ou consœurs (26,7% des situations), de la direction de l’établissement (12% des situations), voire de patients.
À la suite d'une discrimination ou d'un comportement sexiste, 19% des répondants n’ont rien fait.
Pour les répondants, la première réaction a été d’en parler à des proches (44%) ou de chercher à faire reconnaître cette discrimination (12,9 %). Seuls 2% ont décidé de porter plainte et moins d’1% ont saisi leur chef de service ou encore un syndicat. 19% des répondants n’ont rien fait.
Pour plus d’1 médecin sur 4, entamer une démarche officielle ne sert à rien. Parmi les autres raisons de l’inaction, on relève la crainte de représailles (24,1%), le manque de confiance dans les instances professionnelles (14,6%), l’absence de preuves suffisantes (10,3%). Certains médecins affirment avoir pu faire cesser les agissements rapidement, notamment en sensibilisant les collègues (quand les comportements relèvent, selon eux, « plus d’une mentalité » que d’actes dirigés personnellement contre quelqu’un).
Comment agir ? Pour lutter contre le sexisme en France, les répondants considèrent que nous manquons d’outils efficaces (50,8%) et que la loi n’est pas suffisamment appliquée (37,9%). A contrario, ces raisons sont moins citées pour lutter contre le sexisme dans le domaine médical (respectivement, 37,9% pour les outils et 33,6% pour l’application de la loi) mais les répondants dénoncent l’existence d’une omerta, d’un tabou (20,7%) qui semble spécifique au domaine médical (cet argument n’est pas cité au sujet de la lutte contre le sexisme en France).
Plus d’1 médecin sur 3 pense que le plus efficace serait que les ordres instruisent et sanctionnent davantage les situations de discrimination. Plus d’1 médecin sur 3 pense que le plus efficace serait de sensibiliser les futurs médecins sur les recours et les droits dans de telles situations.
Les témoignages que nous avons reçus sont nombreux et toujours plus inquiétants. Peu de progrès semblent avoir été faits dans la lutte contre la discrimination des femmes médecins. La réalité est là, et il faut la regarder en face pour y mettre fin.
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Extraits de témoignages reçus au cours de cette enquête :
« Le sexisme est présent en continu dans les services, par les propos des confrères, l’attribution des postes de travail, l’embauche, le manque d’aménagement à l’accès à la formation pour les femmes avec enfants, le non remplacement du congé maternité entraînant des impacts de formation/recrutement/évolution de carrière »
« J'ai mis très longtemps à m'apercevoir que le fait d'être une femme pouvait être un souci dans le milieu médical »
« On m’a dit que les chefs de clinique ne devaient pas avoir d’enfant ».
« Je suis dans l’attente d’un poste de PH depuis 2023 parce que j’ai eu l’affront de faire un bébé … »
« J’ai clairement payé mon congé maternité : refus de mes congés annuels pour prolonger ce congé maternité, choix des congés d’été après tous mes collègues »
« On n’offre pas les mêmes chances professionnelles aux internes femmes et aux hommes à capacités égales (et dans certains cas inégales avec des internes femmes brillantes défavorisées) »
« Le chef de service fermait totalement les yeux sur le problème puisque pour lui c’était les femmes le problème, nous sommes par définition « chiantes et hystériques » »
« J'ai de nombreux patients homme qui m'ont fait remarqué que je tapais très vite à l'ordinateur et que j'aurais pu faire dactylo...c'est dommage j'ai fait médecine. »
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